Turbines
Profil des vitesses
Dans une turbine, l'évolution du fluide est une détente. Les équations des écoulements compressibles indiquent que, pour un régime subsonique, la section de la veine doit décroître, et la vitesse croître. Cette évolution se fait en deux temps : dans le stator, la vitesse absolue croît, tandis que dans la roue mobile, c'est la vitesse relative qui croît, alors que la vitesse absolue diminue.
Pour étudier le fonctionnement des turbines, on fait appel à la notion de similitude, qui permet de mettre en évidence des grandeurs adimensionnelles judicieuses.
Degré de réaction d'un étage
On appelle degré de réaction la fraction de la variation d'enthalpie qui prend place dans le rotor.
Dans un étage de turbine, la réaction pure est irréalisable. On réalise couramment deux cas limites :
les turbines à action, dans lesquelles le degré de réaction est égal à 0 : toute la détente du fluide est alors réalisée dans les aubages fixes ou tuyères, en amont de la roue, et les pressions en amont et en aval du rotor sont égales ;
les turbines à réaction, dans lesquelles le degré de réaction est égal à 0,5 : la détente est alors également répartie entre les tuyères et la roue.
Chacun de ces deux types de turbine présente des avantages et des inconvénients qui lui sont propres.
Les turbines à action sont généralement utilisées pour les étages de tête des turbines multiétagées ou pour les unités de petite puissance, tandis que les turbines à réaction se révèlent bien adaptées pour les parties basse pression des turbines.
En effet, un premier avantage pour l'utilisation en partie haute pression des turbines à action est que la totalité de la détente étant effectuée dans le stator, le rotor n'est pas soumis à une différence de pression élevée, ce qui limite les contraintes mécaniques. Un second avantage est que le débit dans ces turbines peut être réduit en recourant à l'injection partielle, qui consiste à n'alimenter en fluide qu'une fraction des aubages du stator. Ce type de fonctionnement est rendu possible dans ce cas car la pression est la même sur les deux faces du rotor, et qu'aucun écoulement parasite n'est à craindre dans les parties non injectées.
En revanche, les rendements de ces turbines sont légèrement (2 à 3 %) moins bons que ceux des turbines à réaction, qui sont soumis à une poussée axiale non négligeable, et ne permettent pas de recourir à l'injection partielle.
Étant donné que les irréversibilités qui prennent place dans les étages de tête sont partiellement récupérées dans les étages ultérieurs, on peut tolérer que leur rendement soit légèrement plus faible, ce qui permet de recourir dans ce cas à des turbines à action.
Différents types de turbines à vapeur
En fonction de leur utilisation, on distingue quatre grandes catégories de turbines à vapeur :
les turbines à condensation, dans lesquelles la vapeur est complètement détendue jusqu'à une pression voisine de 0,02 à 0,04 bar, puis liquéfiée dans un condenseur refroidi soit par l'air ambiant, soit par de l'eau. Ce type de turbine est surtout utilisé dans les installations de production de force motrice ;
les turbines à contre-pression, dans lesquelles la vapeur est détendue de la pression HP (> 40 bars) jusqu'à une pression BP (de l'ordre de 4 bars). Ce type de turbine permet de produire de la puissance mécanique ou de l'électricité grâce aux hautes température et pression que l'on peut obtenir dans une chaudière, tout en utilisant l'enthalpie résiduelle pour des procédés divers ;
les turbines à soutirage et condensation, dans lesquelles la vapeur subit une détente partielle jusqu'à une moyenne pression (environ 20 bars) dans un corps haute pression. Une partie est dirigée vers un réseau d'utilisation, tandis que le reste de la vapeur est détendu dans un corps basse pression, comme dans une turbine à condensation. Ce type de turbine trouve un champ d'application important dans les usines de cogénération dont les demandes de chaleur sont susceptibles de varier fortement au cours du temps ;
les turbines à soutirage et contre-pression, dont la vapeur s'échappe à basse pression dans un réseau BP au lieu d'être condensée.
Hypothèses de modélisation
Les machines réalisant la compression ou la détente d'un fluide ont une conception très compacte pour des raisons de poids, d'encombrement et de coût. Pour les mêmes raisons, elles tournent très vite (plusieurs milliers de tours par minute). Chaque parcelle de fluide y séjourne très peu de temps.
Par ailleurs les coefficients d’échange thermique des gaz ont des valeurs faibles. Les courts temps de séjour, les petites surfaces de contact fluide-paroi, et les faibles coefficients d’échange font que l'échange de chaleur est minime et que le fonctionnement de ces machines est pratiquement adiabatique.
Dans ces conditions, la transformation idéale de référence est l'adiabatique réversible, c'est à dire la transformation isentropique.
Toutefois, dans une machine réelle, des irréversibilités prennent place, essentiellement dues aux frottements visqueux et aux chocs. Elles ont pour conséquence d'augmenter la température du fluide et son entropie. Dans un diagramme entropique, l'allure de l'évolution s'écarte ainsi de l'isentropique théorique (cf. figure ci-dessous).
Méthode de calcul
Pour calculer le travail mis en jeu dans une détente adiabatique réelle, il y a deux manières d'opérer :
la première consiste à introduire un rendement appelé rendement isentropique ou adiabatique, déterminé expérimentalement, qui est défini comme comme le rapport entre le travail de détente réel et le travail de détente isentropique ;
la deuxième manière consiste à introduire la notion de polytropique. Pour cela, on fait l'hypothèse que les irréversibilités sont uniformément réparties pendant l'ensemble de la transformation. On peut alors mettre en évidence une équation différentielle faisant appel au rendement polytropique, équivalent à un rendement isentropique élémentaire, qui conduit à la relation simple pour les gaz parfaits :
Si l'on retient la première approche (par rendement isentropique), la séquence de règles de calcul d'une détente peut s'énoncer de la manière suivante :
1) il faut commencer par calculer l'entropie à l'aspiration s(Pa, Ta) ;
2) il faut ensuite inverser en Ts l'équation s(Pr, Ts) = s(Pa, Ta) ;
3) il faut calculer le travail correspondant à l'évolution isentropique Dhs = h(Pr, Ts) - h(Pa, Ta) ;
4) on en déduit l'enthalpie de sortie hr = h(Pa, Ta) + Dhs*eta , eta étant le rendement isentropique ;
5) enfin, on obtient la température de refoulement en inversant en Tr l'équation h(Pr, Tr) = hr
L'icône d'une turbine dans Thermoptim est :
L'écran d'une turbine propose plusieurs paramétrages thermodynamiques possibles :
si la détente est adiabatique, on peut choisir une approche isentropique ou polytropique. Il faut alors entrer la valeur du rendement isentropique ou polytropique
si la détente n'est pas adiabatique, le mode de calcul est alors impérativement polytropique. Il faut entrer les valeurs du rendement et de l'exposant polytropiques
Caractéristique d'une turbine
Dans le cas de la cartographie d'une turbine, c'est conventionnellement le rapport de pression qui est utilisé en abscisse. En ordonnée, on trouve le débit massique corrigé ou l'efficacité isentropique de la machine. Le paramètre des courbes est la vitesse de rotation corrigée, qui ne joue ici qu'un rôle secondaire.
On constate la grande souplesse d'adaptation des turbines aux différents régimes de fonctionnement : ce n'est que lorsqu'on veut très fortement réduire le rapport de pression ou la vitesse de rotation que les performances tendent à se dégrader. Cette souplesse tient en particulier à la stabilité d'écoulement dans les aubages liée au gradient de pression qui y règne. Mais, ce qui est surtout remarquable, c'est la stabilité du débit vers les hauts rapports de pression, qui provient du régime supersonique qui s'établit dans une partie au moins de la machine (le débit est dit choqué à l'endroit où la vitesse du son est atteinte).
La valeur limite atteinte par le débit, dès que le rapport de pression excède le rapport critique, appelé débit critique, est proportionnelle à la section au col, laquelle est bien évidemment indépendante de la vitesse de rotation, ce qui explique la faible influence de ce paramètre.
Ecran de dimensionnement technologique
Les écrans technologiques des turbines ont été conçus pour permettre de représenter aussi bien que possible les caractéristiques de ces machines. Leur complexité nous a conduits à proposer des jeux d'équations d'ajustement des courbes aussi précises que possible tout en restant utilisables en pratique.
Nous avons privilégié une représentation permettant de séparer le plus possible les variables, optant pour une prise en compte de l'influence de la vitesse de rotation réduite N par des fonctions polynomiales du deuxième degré.
Le débit réduit peut ainsi être représenté par différentes fonctions, comme par exemple par une cubique du rapport de détente Pa/Pr définie par 12 paramètres relativement simples à identifier, auxquels il faut ajouter une dimension géométrique, généralement un diamètre de roue D, tandis que le rendement isentropique l'est par une fonction particulière (dite de Dehausse) à 15 paramètres supplémentaires.
En mode dimensionnement, le débit et le rapport de détente étant donnés, la séquence des calculs est la suivante :
les conditions d'admission et l'inversion en N de l'équation donnant le débit déterminent la vitesse de rotation, dont on déduit D si on se fixe U ou Ma ;
connaissant N, l'équation donnant le rendement isentropique fournit eta.
En mode non-nominal, D, la vitesse de rotation et le rapport de détente étant connus, la séquence des calculs est la suivante :
N est fixé par les conditions d'admission ;
le débit corrigé est donné par l'équation qui le relie à Pa/Pr ;
eta est donné par son équation ;
la puissance de détente et l'état de sortie peuvent alors être calculés.
On prendra garde à ce que les cartographies ne sont valables que si la vitesse de rotation se situe dans une plage de valeurs adéquate.
On aboutit ainsi à une représentation concise (une trentaine de paramètres environ) et facilement manipulable sur le plan pratique.
L'écran technologique d'une turbine (figure ci-dessous) possède dans sa partie supérieure droite un libellé ("Turbine data") qui donne accès par double-clic à l'écran permettant d'afficher la série de coefficients décrivant les deux caractéristiques.
A droite de l'écran technologique, apparaît en médaillon une image correspondant aux caractéristiques retenues si elle a été chargée (cf. figure ci-dessous).
Une note méthodologique expliquant comment peuvent être modélisées les turbomachines est téléchargeable.
Références livre
Chapitres 4 du tome 1 et 5 du tome 2 (turbines)
Un extrait de ce chapitre est librement téléchargeable avec l'accord des Presses de l'Ecole des Mines de Paris
Chapitre 15 du tome 3 (Modélisation en régime non-nominal des turbines)
Un extrait de ce chapitre est librement téléchargeable avec l'accord des Presses de l'Ecole des Mines de Paris
Séances Diapason disponibles
n° | contenu | étapes | durée de la sonorisation |
---|---|---|---|
S11 | 16 | 5 mn 45 s | |
S13 | 27 | 19 mn |