Echangeurs de chaleur
Technologie
Les échangeurs de chaleur sont des appareils permettant de transférer de la chaleur entre deux fluides à des températures différentes. Dans la plupart des cas, les deux fluides ne sont pas en contact, et le transfert s'effectue à travers une surface d'échange. Au sein de la paroi séparatrice, le mécanisme de transmission de la chaleur est la conduction, et, sur chacune des deux surfaces de contact avec les fluides, ce sont presque toujours les phénomènes de convection qui prédominent.
Dans de nombreux cas, les fluides restent monophasiques, qu'ils soient gazeux ou liquides. Il existe toutefois trois grandes catégories d'échangeurs dans lesquelles surviennent des changements de phase : les vaporiseurs ou évaporateurs où l'on vaporise un liquide, les condenseurs où une vapeur est liquéfiée, et les vapocondenseurs dans lesquels les deux fluides changent de phase.
Bien qu'il existe une très importante variété de modèles d'échangeurs, les quatre principales catégories utilisées dans les systèmes énergétiques sont les suivantes :
les échangeurs tubulaires
les échangeurs à tube et calandre
les échangeurs à ailettes
les échangeurs à plaques
On appelle pincement d'un échangeur l'écart minimal de température en son sein.
L'importance du pincement se manifeste surtout dans les problèmes de conception des réseaux d'échangeurs complexes, au point que de puissantes méthodes d'optimisation basées sur cette notion ont été développées.
Celle de Thermoptim , dérivée de la méthode du pincement[1][1] (pinch method en anglais), est présentée dans la rubrique Guides méthodologiques.
Echangeurs tubulaires
Echangeurs à ailettes
Hypothèses de modélisation
Trois hypothèses de base sont généralement retenues pour modéliser un échangeur :
en première approximation, il peut être considéré comme isobare ;
il est globalement adiabatique, c'est-à-dire qu'il n'y a aucun échange de chaleur avec l'environnement ;
les coefficients d'échange thermique et les propriétés thermophysiques des fluides gardent une valeur constante à tout moment dans la totalité de l'échangeur.
Dans un échangeur, l'écoulement des deux fluides peut s'effectuer dans de multiples dispositions relatives : parallèlement, à contre-courant, de manière croisée...
On peut facilement démontrer que, sur le plan thermodynamique, l'échangeur le plus performant est l'échangeur à contre-courant, mais d'autres préoccupations que l'efficacité thermodynamique entrent en ligne de compte lorsque l'on conçoit un échangeur : les températures maximales admissibles dans l'un des fluides, ou plus souvent des considérations d'encombrement, de poids ou de prix de revient.
Il en résulte que les configurations des échangeurs que l'on rencontre en pratique sont relativement nombreuses.
On peut cependant ramener ces configurations à trois géométries principales :
les écoulements à contre-courant, dans lequel les fluides circulent parallèlement et en sens contraire ;
les écoulements co-courant, dans lequel les fluides circulent parallèlement et dans le même sens ;
les écoulements croisés, dans lesquels les fluides circulent dans des directions perpendiculaires.
D'une manière générale, le dimensionnement des échangeurs est un compromis entre des objectifs contradictoires, dont les deux principaux sont les suivants :
une grande surface d'échange est souhaitable pour augmenter l'efficacité des échangeurs, mais elle se traduit par des coûts élevés ;
de faibles sections de passage des fluides permettent d'augmenter les valeurs des coefficients d'échange thermique, et donc de réduire les surfaces, mais elles font aussi croître les pertes de charge.
Méthode de calcul
La méthode de calcul que nous préconisons est celle du NUT, ou encore Nombre d'Unités de Transfert. Nous nous contenterons ici d'une présentation très synthétique, les extraits de l'édition 2009 du livre Systèmes Energétiques disponibles dans les liens ci-dessous étant beaucoup plus détaillés.
Par définition, NUT est défini comme le rapport entre le produit UA de l'échangeur et le débit de capacité thermique le plus faible :
On appelle R le rapport (inférieur à 1) du débit de capacité thermique le plus faible au plus fort :
et e l'efficacité de l'échangeur, définie comme étant le rapport entre le flux de chaleur réellement transféré et le flux maximum possible :
On peut montrer que le flux maximum phimax serait obtenu pour un échangeur à contre-courant de longueur infinie, et vaut :
DeltaTe étant la différence entre les températures d'entrée des deux fluides
DTmax étant l'écart de température maximal au sein de chacun des deux fluides et non entre eux, on a :
Avec ces définitions, il est possible de montrer qu'il existe une relation générale du type :
e = f(NUT, R, configuration d'écoulement)
A titre d'exemple, pour un échangeur à contre-courant, les expressions analytiques sont, pour R différent de 1 :
Si R = 1 :
Ces équations correspondent à l'abaque ci-dessous :
En pratique, il suffit de disposer d'une série de relations correspondant aux configurations d'écoulement représentatives des échangeurs étudiés, et le dimensionnement d'un échangeur se fait sur la base, d'une part des équations de bilan, et d'autre part de la relation e = f(NUT, R, configuration d'écoulement).
En mode dimensionnement, connaissant les débits des deux fluides, leurs températures d'entrée et le flux à échanger, on opère de la manière suivante :
on commence par déterminer les températures de sortie des fluides à partir de l'équation de bilan ;
on en déduit les débits de capacité thermique m cp des fluides et leur rapport R ;
on calcule l'efficacité e à partir de DeltaTmax et DeltaTe ;
on détermine la valeur du NUT à partir de la relation (NUT, e) appropriée ;
on calcule le produit UA à partir de l'équation définissant NUT.
En régime non-nominal, si l'on connaît le produit UA, l'équation définissant NUT donne sa valeur, et on détermine celle de e à partir de la relation (NUT, e) appropriée.
L'équation de bilan permet alors de calculer le flux transféré.
Dans les deux cas, le bilan enthalpique fournit les températures de sortie.
En pratique, on ne connaît pas UA mais A. Cependant, on peut souvent considérer que U ne varie qu'au deuxième ordre, et rechercher une solution approchée en considérant U constant, puis recalculer sa valeur pour les nouvelles conditions de fonctionnement, et itérer jusqu'à obtenir une précision raisonnable. Il est en particulier nécessaire d'opérer ainsi lorsque l'échangeur est multizones, car seule la surface totale est connue, et non sa répartition entre les différentes zones.
Représentation dans Thermoptim
Rappelons qu'une transfo "échange" sert à calculer l'échauffement ou le refroidissement d'un fluide entre deux états représentés par les points amont et aval.
Elle est représentée dans Thermoptim par l'icône :
Comme indiqué plus haut, les transfos "échange" peuvent être considérées comme isobares en première approximation. Les pertes de charge sont en effet généralement relativement faibles.
Dans Thermoptim, un échangeur n'est pas représenté par un composant particulier, mais par une connexion établie entre deux transformations "échange" qui représentent l'une le fluide chaud, et l'autre le fluide froid.
Pour représenter les échangeurs dans l'éditeur de schémas, on utilise donc des liens non orientés reliant entre eux deux composants de type "échange".
Un échangeur est créé dans le simulateur lorsqu'une connexion d'échangeur existe dans le schéma et que les deux composants "échange" qui le relient correspondent à deux transfos "échange" du simulateur suffisamment bien définies (la transfo chaude doit bien correspondre à un refroidissement et la transfo froide à un échauffement, et leurs niveaux de température doivent être compatibles).
Compte tenu des hypothèses retenues, l'échangeur est nécessairement équilibré sur le plan enthalpique, c'est-à-dire que l'enthalpie cédée par le fluide chaud est exactement égale à celle reçue par le fluide froid.
Etant donné qu'il y a quatre températures (deux pour chaque fluide) et deux débits, calculer un échangeur comporte cinq degrés de liberté une fois la conservation de l'enthalpie assurée. On peut par ailleurs montrer que l'un des deux débits au moins doit être spécifié, faute de quoi le problème est indéterminé.
Pour les températures, on peut imposer des contraintes explicites : on fixe par exemple les températures d'entrée des fluides, ou des contraintes implicites : on impose une valeur pour l'efficacité de l'échangeur, ou encore que le pincement soit égal à une valeur minimale.
Pour que le problème soit soluble, il faut donc fixer un total de cinq contraintes, dont l'une de débit imposé. Si l'une d'entre elles est implicite (efficacité ou pincement imposé), il doit y en avoir quatre explicites (3 températures et 1 débit imposés, ou 2 températures et 2 débits imposés), sinon il en faut cinq (un seul débit ou une seule température de libre). Ces conditions sont nécessaires, mais non suffisantes.
Thermoptim propose donc de multiples options de dimensionnement correspondant à ces degrés de liberté. Il importe d'être conscient qu'elles peuvent ne pas avoir de sens physique et qu'il faut toujours bien réfléchir à la situation de l'échangeur dans le système afin de les valider.
Par exemple, si le débit de l'un des fluides est fixé par d'autres composants ou par un pilote externe, il est absurde de paramétrer l'échangeur en choisissant que ce débit soit calculé. C'est notamment le cas lorsque l'on étudie un générateur de vapeur composé de trois échangeurs en série : bien évidemment les débits de chacun des fluides qui les traversent sont généralement les mêmes dans les trois éléments, et les températures de sortie d'un élément sont égales à celles d'entrée du suivant. Thermoptim ne diagnostiquera pas un paramétrage aberrant tant qu'il ne conduira pas à une impossibilité numérique, mais les calculs n'auront pas de sens.
La figure ci-dessus montre l'écran d'un échangeur dans Thermoptim. Il comporte les informations relatives au fluide chaud dans sa partie centrale gauche, tandis que celles relatives au fluide froid sont à droite.
Outre les valeurs des températures, débits, chaleurs massiques et enthalpies mis en jeu, apparaissent des contraintes sur les températures et les débits qui servent à gérer le calcul des échangeurs, en permettant de distinguer, parmi les variables du problème, celles qui sont imposées et celles qui doivent être calculées.
Les types possibles d'échangeurs sont les suivants : contre-courant, co-courant, courants croisés, mélangés ou non, et (p-n).
Dans la partie inférieure gauche, apparaissent trois boutons permettant éventuellement de spécifier l'absence ou la présence de contraintes implicites sur les températures.
Dans la partie inférieure droite sont placées les boîtes à cocher permettant de définir le mode de calcul ("dimensionnement" ou "non nominal").
Calcul du coefficient d'échange thermique global U
La méthode du NUT que nous avons présenté plus haut, et qui est utilisée dans la version phénoménologique de Thermoptim, ne fournit que le produit UA du coefficient global d'échange par la surface de l'échangeur, sans que les deux termes soient évalués séparément.
Pour pouvoir dimensionner l'échangeur, c'est-à-dire calculer sa surface, il faut d'une part choisir sa configuration géométrique, et d'autre part calculer le coefficient global d'échange U, qui dépend de cette configuration et des propriétés thermophysiques des fluides.
Le coefficient d'échange thermique global U dépend de la répartition des résistances thermiques dans l'échangeur. Si les surfaces d'échange sont égales pour les deux fluides, où e/l représente la résistance de paroi, lambda étant ici la conductivité du matériau la composant :
Les valeurs des coefficients de convection hc et hf sont fonction des propriétés thermophysiques des fluides et des configurations d'échange, les régimes convectifs dépendant fortement de la vitesse d'écoulement.
Elles peuvent être obtenues à partir de corrélations donnant la valeur du nombre de Nusselt, lambda étant ici la conductivité du fluide :
Le nombre de Nusselt est une fonction des nombres de Reynolds et de Prandtl :
Re dépend de la masse volumique, de la vitesse d'écoulement, du diamètre hydraulique et de la viscosité cinématique.
Pr dépend de la viscosité cinématique, de la capacité thermique massique et de la conductivité du fluide.
C1, a, b, et c étant des constantes, le nombre de Nusselt est presque toujours donné par une relation du type :
La correction de viscosité se fait par rapport à la température de la paroi. Les coefficients C1, a et b varient selon les configurations rencontrées, et le terme supplémentaire pour tenir compte des variations de la viscosité est souvent négligé.
D'une manière générale, l'exposant du nombre de Reynolds est compris entre 0,5 et 0,8, et celui du nombre de Prandtl entre 0,33 et 0,4.
Le régime d'écoulement a une influence importante sur la valeur de Nu.
Dans le cas où Re est inférieur à 2000, le régime est laminaire, et si Re est supérieur à 5000, il est turbulent, avec une zone de transition, ces frontières n'étant pas parfaitement stables.
Pour un écoulement laminaire établi, Nu = Cste, la valeur étant comprise entre 4 et 8 environ, en fonction de la forme du tube et du mode d'échange de chaleur (température ou flux constant).
Ecran de dimensionnement technologique
Les paragraphes précédents ont permis de montrer que le calcul du coefficient d'échange U dépend en premier lieu de :
la valeur du nombre de Reynolds, fonction lui-même de la vitesse d'écoulement du fluide et du diamètre hydraulique ;
la valeur du nombre de Prandtl, qui ne dépend que des propriétés thermophysiques du fluide, et non de la géométrie ;
la configuration d'écoulement, qui détermine les valeurs des coefficients C1, a et b.
C'est sur cette base qu'ont été définis les écrans technologiques des échangeurs de chaleur (figure ci-dessous).
L'écran de dimensionnement technologique de l'échangeur contient dans sa partie inférieure gauche les deux zones relatives à chaque transfo "échange".
Pour le calcul des coefficients d'échange thermique et des pertes de charge, deux grandeurs sont toujours nécessaires : la section de passage dévolue au fluide Ac, nécessaire pour déterminer la vitesse d'écoulement, et le diamètre hydraulique dh.
Lorsque, comme c'est le cas dans cet exemple, les coefficients d'échange thermique des fluides sont très différents, on a recours à des dispositifs divers comme des ailettes pour compenser l'écart entre leurs valeurs. On parle alors de surfaces étendues, qui peuvent être caractérisées par un facteur de surface f et un rendement d'ailette eta.
Ces quatre paramètres sont ceux qui ont été retenus pour caractériser les échanges thermiques au niveau de chaque fluide. On leur ajoute la longueur de l'échangeur pour certains calculs, notamment des pertes de charge.
Dans l'écran de dimensionnement technologique des échangeurs ci-dessus, les conventions suivantes sont adoptées :
"free flow area" représente la section de passage Ac ;
"hydr. diameter" est le diamètre hydraulique habituel dh ;
"length" est la longueur de l'échangeur ;
"surface factor" est le facteur de surface f pour les surfaces étendues ;
"fin efficiency" est le rendement d'ailettes eta ;
la résistance de paroi e/lambda est saisie dans la partie supérieure droite de l'écran, sous le bouton "Quitter". Elle permet de prendre en compte des résistances d'encrassement si on le souhaite.
Les valeurs des paramètres de dimensionnement technologique doivent être saisis pour chacun des deux fluides, ainsi que leur configuration d'écoulement choisie dans la liste proposée, ici "ext_tube Colburn correlation" pour l'air de refroidissement, et "int_tube Mac Adams correlation" pour l'eau.
Pour paramétrer un tel écran, il faut commencer par déterminer les diamètres hydrauliques dh et les sections de passage Ac des deux fluides, en fonction du problème considéré.
Des exemples sont donnés dans la rubrique Guides méthodologiques, et la séance Diapason S18NN sur la thermodynamique avancée des échangeurs explique toutes ces notions. Elle est accessible depuis un lien ci-dessous.
Références livre
Chapitre 5, tome 1 (échangeurs de chaleur)
Un extrait de ce chapitre est librement téléchargeable avec l'accord des Presses de l'Ecole des Mines de Paris
Chapitre 13, tome 3 (modélisation et paramétrage des échangeurs pour le dimensionnement et le régime non-nominal)
Un extrait de ce chapitre est librement téléchargeable avec l'accord des Presses de l'Ecole des Mines de Paris
Activités proposées
Exercice d'auto-évaluation
Explorations dirigées
Cette exploration dirigée vous guide dans vos premiers pas de paramétrage d'un condenseur de centrale à vapeur.
Elle fait suite à l'exploration dirigée S-M3-V7 qui présentait le cycle de la centrale.
Une particularité des générateurs de vapeur des centrales nucléaires REP est l'absence de surchauffe initiale.
Une détente complète de la vapeur à partir de cet état conduirait à un titre en vapeur trop faible, ce qui serait à la fois pénalisant sur le plan des performances, et fatal pour la tenue mécanique des aubages des turbines.
La solution retenue consiste, en utilisant un organe particulier appelé séparateur – surchauffeur, à fractionner la détente en prévoyant une resurchauffe à une pression d'environ 11 bar, ce qui permet d'augmenter le rendement et de respecter la contrainte de titre de fin de détente.
Cette exploration montre comment un tel cycle peut être modélisé et paramétré.
Les cycles organiques de Rankine sont des variantes des cycles à vapeur d'eau, que l'on utilise lorsque la source chaude à partir de laquelle on souhaite produire de la puissance mécanique est à basse ou moyenne température, ou bien lorsque la puissance installée est faible et que les installations à vapeur ne sont plus économiques.
Cette exploration présente un exemple de cycle ORC destiné à produire de l'électricité à partir du gradient thermique des océans.
Vous apprendrez comment paramétrer un triple échangeur de chaleur et approfondirez la notion de pincement
Cette exploration dirigée présente un cycle combiné à un niveau de pression. L'accent est mis sur le paramétrage de l'échangeur interne qui permet de transférer au cycle à vapeur l'enthalpie résiduelle des gaz sortant de la turbine, et qui s'appelle un générateur de vapeur récupérateur ou GVR.
Séances Diapason
n° | contenu | étapes | durée de la sonorisation |
---|---|---|---|
S10 | 5 | 1 mn 35 s | |
S18 | 13 | 13 mn | |
S18NN | 42 | 45 mn | |
S19 | 7 | 3 mn 20 s |